TW : Harcèlement et suicide.Les vagues douces du Pacifique baignaient silencieusement les côtes de Tokyo, s'échouant sur le rivage avant de repartir... Pour recommencer leur balais incessant.
Tout près, une épave de bateau émergeait de l'eau, témoignant d'une histoire naufragée.
Asami s'approchait de cette relique maritime, les pensées chargées d'un poids lourd de culpabilité et de chagrin.
Des rumeurs persistantes parmi les défunts qu'elle avait interrogés, lui parlant de Chimères aquatiques qui s'étaient établies dans ces débris délabrés, mais la Japonaise n'hésitait pas.
L'épave se dressait comme une sculpture déformée par l'assaut des vagues, les restes déchirés d'une vie maritime passée et oubliée de tous.
La coque pourrie était tatoué par le sel marin et les algues, donnant à l'épave une aura à la fois mélancolique et angoissante.
Hiiragi pénétra dans les entrailles de cette carcasse, traversant des corridors obscurcis par l'ombre et l'humidité, la lampe torche de son téléphone éclairant les ténèbres.
Au cœur de ce vaisseau fantôme, elle découvrit un sanctuaire insoupçonné, où la nature avait repris ses droits.
Des algues phosphorescentes pendaient comme des lustres naturels, éclairant faiblement la scène.
Et là, au centre de cette danse luminescente, se trouvait Mari Watanabe, autrefois une camarade de classe harcelée, transformée en une créature mi-humaine, mi-méduse.
La métamorphose avait altéré son apparence, la dotant de tentacules ondoyants et d'une aura éthérée.
Mari Watanabe, désormais méconnaissable, tourna son regard perçant vers Asami. Son regard, teinté de tristesse et de reproche, glaça l'atmosphère.
Asami avala difficilement sa salive, sentant son cœur battre la chamade. Elle murmura un timide :
-«Bonjour...»La voix frêle, comme une brise délicate. Mais la réponse de Mari ne fut pas aussi douce.
D'un geste rapide et soudain, la chimère marine gifla Asami, l'expression pleine de mépris.
L'impact résonna dans la pièce déserte, laissant la japonaise figée sur place.
Les yeux de la chimère déversaient un torrent de reproches muets, une souffrance accumulée au fil des années.
Asami, touchée et désemparée, s'effondra à genoux, ses mains tremblantes plaquées contre ses joues rougies par la gifle.
Des larmes jaillirent de ses yeux, des larmes lourdes de remords et de chagrin.
-« Je suis désolée...»Sanglota-t-elle, des paroles imprégnées d'une douleur profonde.
-« Je regrette tellement ce que j'ai fait. Je ne peux pas changer le passé, mais je voudrais tellement pouvoir le réparer.»Les sanglots secouaient son corps frêle, et dans ce lieu empreint de l'océan et du temps, Asami laissa échapper le poids de son repentir.
Elle s'excusait sincèrement, espérant que ses mots trouvent écho même au fond de cette créature aquatique, autrefois une jeune fille harcelée.
Mari, elle, restait muette, les yeux fixés sur cette âme éplorée. La méduse humaine ressentait-elle la sincérité des regrets ? Ou était-elle simplement captive de sa propre transformation, enfermée dans une réalité qui n'offrait pas de rédemption ?
Finalement, la voix de la méduse se fit entendre, chargée d'une amertume profonde.
-« C'est de ta faute, Hiiragi.»Cracha-t-elle, ses mots empreints de reproche.
-« Tout cela est arrivé à cause de toi.»Asami leva les yeux, surpris par la déclaration accusatrice.
-« Quoi ?»Balbutia-t-elle, l'esprit embrouillé par la culpabilité et la confusion.
-« De... De quoi parles-tu ?»Watanabe, avec une froideur déconcertante, énuméra chaque souffrance qu'elle avait endurée à cause de l'harcèlement perpétrée par son interlocutrice.
Les jours sombres où elle était devenue une cible, les nuits sans fin où le chagrin avait étouffé son sommeil.
Les larmes d'Asami se mêlaient à l'eau salée qui imprégnait l'air, créant une symphonie mélancolique dans cette chambre d'océan abandonnée.
-« Tu m'as brisée !»Accusa Mari, ses tentacules ondoyant avec une grâce sinistre.
-« Tu m'as poussée à bout. Tu as été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase de ma souffrance. J'ai cru pouvoir échapper à cette douleur en venant ici, en disparaissant. Mais même ici, je ne trouve pas la paix, tu me poursuis.»Asami, abasourdie, était tétanisée par les révélations. Les mots cinglants de Mari résonnaient dans son esprit, formant un écho d'accusations douloureuses.
-« Je ne voulais pas... Je ne savais pas que tu... que tu en arriverais là...» Balbutia-t-elle, sa voix pleine de désarroi.
-« Les mots ont du pouvoir, Hiiragi.»Répliqua la chimère, la méprisant de son regard lumineux.
-« Ton harcèlement a eu des conséquences bien au-delà de ce que tu pouvais imaginer. Tu ne peux pas effacer le mal que tu as causé, même si tu pleures maintenant. C'est trop tard.»La vérité, cruelle et implacable, émergeait des profondeurs, ébranlant la jeune Japonaise dans sa chair et son âme.
Mari s'approcha d'Asami, lui saisissant le menton avec ses doigts spongieux.
La japonaise fut forcée de regarder le regard mauvais de son ancienne victime qui lui souffla :
-« C'est à ton tour de souffrir.»