tw : vomissements, sang, meurtre, violence
L’odeur te saisit le nez avec la force d’un poing dans la gueule, le goût dégueulasse envahit ta bouche puis ta gorge. Tu confirmes que tu as connu pire mais quand même, tu passes un
très mauvais moment. Tes yeux se ferment alors que la fiole semble glisser pour atterrir à côté de toi dans le fauteuil. Tu ne te sens pas très bien et c’est un putain d’euphémisme. Ça tourne un peu, tu sais pas trop si tu dois t’accrocher, te lever ou juste ne pas bouger ; tu finis par choisir la dernière option notamment parce que tu as l’impression que rien ne répond comme il le faudrait. Tes bras lourds, ta tête dans un tourbillon, tes jambes clouées au sol à tel point que tu ne les sens plus.
La suite tu saurais pas trop la décrire. C’est confus. Rapide. Douloureux, aussi. T’as l’impression qu’on essaye de t’enfoncer trop de choses dans le crâne d’un coup et que ça résiste, tu grimaces et t’as envie de te saisir le visage mais encore une fois, ton corps refuse de se laisser commander. Des flashs, des images, des visages. Tu ne les connais pas, si ? Peut-être. Non. Si. Cette sensation horrible de reconnaître sans savoir si c’est réellement le cas ou si c’est une illusion. Et puis dans cette tempête visuelle, une image semble se fixer. Celle d’un visage, le premier que tu reconnais. Comment t’as pu l’oublier, lui qui t’a sorti du trou dans lequel tu t’étais terré en revenant de la guerre ? Son nom ne te revient pas -pas tout de suite. Tu reconnais son air bourru, son regard perçant et sa voix grave qui te gronde. Non, pas exactement. C’est de l’inquiétude, pas de la colère.
Il te secoue et tu comprends pas pourquoi. Ta vision est brouillée c’est bizarre ; tu finis par comprendre que tu pleures. Tu cries aussi alors qu’il te retient et que tu hurles encore plus. Quelque chose ne va pas, pourquoi tu pleures ? Pourquoi tu t’époumones comme un con, comme ça ?
Qu’est-ce qui tourne pas rond chez toi Constantine ? A travers tes propres cris, tu l’entends te dire que c’est pour ça qu’il fallait pas t’attacher, que t’es pas fait pour ça. Que c’est pas grave, t’as fait de ton mieux. T’as essayé, t’as tout tenté. C’était juste pas assez, c’est comme ça la vie. Tes sanglots sont tels que tu vomis à t’en déshydrater, à t’en brûler la gorge ; qu’elle explose pour ce que tu en as à foutre.
Telles des vagues irrégulières, des images se collent sur ta rétine. Joshua qui te dit de laisser tomber, mais tu refuses. Tu insistes et finalement tu l’écoutes pas. T’en fais qu’à ta tête, une tête de con comme il le disait souvent. Tu revois le visage de
ta cliente. Ses larmes, sa détresse. Tu la rassures, elle n’a pas l’air de te croire. Son visage se déforme et tu te retrouves à tabasser un gars dans une ruelle avec une colère glaçante, mordante. Enragé. Le sang t’éclabousse et même si ta vision se fait difficile tu t’arrêtes plus. Des menaces, d’une voix qui est bien la tienne mais qui te semble si différente. Le visage de ta cliente qui réapparaît, souriante, apaisée. Ce même visage que tu vois ensuite dans les news, puis sur la scène du
crime, déformé par la peur, séparé du reste de son corps.
Et comme une avalanche, tout le reste suit.
Elisa. Ta spirale autodestructrice. Ta replongée, violente. Ta vie chaotique, honteuse, emplie de regrets et d’erreurs.
Quand t’ouvres les yeux tu inspires violemment comme si tu manques d’air. Une éternité semble être passée pour toi ; quelques secondes en réalité. Et tu te sens mal, très mal, trop mal. Tu te jettes presque du fauteuil, une main sur la bouche, renversant la fiole qui s’écrase au sol. T’as pas le temps de t’en inquiéter que te voilà déjà en train de courir vers la salle de bain.
Heureusement que tu reconnais les lieux. Et que ton corps te répond enfin.Tu rends tout ce que tu as, la tête au fond des chiottes, une scène véritablement pathétique. T’as l’impression que tes entrailles vont suivre tellement c’est violent, bien plus que tout ce que t’as connu ces dernières décennies. Tu pleures aussi et tu sais pas si c’est à cause de la douleur ou juste de tristesse -ou d’autre chose.
« Put…ain de m… »Tu peux pas finir ta phrase que tu te vides de nouveau l’estomac. Ça brûle. Les paumes tremblantes, la sueur qui perle sur ton front, les oreilles qui bourdonnent. Il te faut un moment avant que tes épaules ne soient plus secouées de spasmes frénétiques et tu t’accroches à ce que tu peux, comme si t’avais peur de couler au fond des toilettes avec tout ce qui vient de te quitter.
Résumé
817 mots
pardon Tantine