Même si Shizuma part du principe qu’aucun cours (surtout en tête à tête) ne se ressemble, il y a tout de même des jours qui sont un peu plus calmes que d’autres. Déjà, quand il a affaire à des élèves réguliers. Il en a peu, mais ces quelques-uns s’accrochent dur comme fer. Et Shizuma adopte une petite routine avec ces derniers. Il sait ce qu’ils préfèrent, ce qui fonctionne, etc. Avec les nouveaux élèves, c’est déjà un peu différent : chacun doit prendre ses marques avec l’autre, jusqu’à trouver des paternes qui s’ajustent aux deux.
Mais aujourd’hui, c’est différent. En fait, quelque-chose lui gratte l’arrière du crâne sans trop savoir quoi. C’est au sujet du cours de ce matin : il connait ce nom. Il ne sait plus où, ni pourquoi, ni comment, mais il l’a déjà vu quelque-part. Sa mémoire n’est pas mauvaise, mais pas toujours fiable non plus et il en fait particulièrement les frais depuis ces derniers jours avec ce fichu nom.
Depuis que Vela s’est de nouveau frayé un chemin dans sa vie, Shizuma est devenu à moitié paranoïaque. Partout où il va, il a l’impression qu’elle est là. Qu’elle le suit, qu’elle guette le moindre de ses faits et gestes et qu’elle finira, d’une manière ou d’une autre, à remettre la main sur lui. Il s’inquiète de chaque détail qui lui semble étrange et puis merde, pourquoi est-ce que ce nom lui dit quelque-chose ? Il essaye de chercher des associations, de fouiller les archives dans ses souvenirs pour retrouver le lien que ce nom pourrait avoir avec Vela.
Il n’y en a aucun. Mais ça, il ne s’en rend compte qu’une fois qu’il est déjà assis, les genoux repliés sur sa poitrine, sur son petit tapis rose installé à quelques dizaines de mètres de la magnifique cascade qui leur tiendra compagnie pour le reste de la séance.
Warren K. Miller. Bien-sûr que oui…
La voix qui l’appelle le fait presque sursauter et il arbore ses plus beaux yeux de merlan frit quand la personne s’approche de lui avant de réaliser que c’est son élève. Il bondit presque sur ses pattes et la ligne de ses lèvres se fend en son sourire habituel, naturel et sincère. Il lae salue de sa plus belle courbette et joint ses mains ensemble, ravi à l’idée de pouvoir commencer d’ici peu.
J’ai fait des petits coeurs avec une craie rose sur les bûches exprès pour ne pas que tu te perdes !
La craie rose, c’était vraiment la partie la plus importante de l’information. Il prend une grande inspiration et hoche la tête, soudainement d’excellente humeur. Oubliée Vela, les problèmes, le nom bizarre. De toute façon, c’est bon, il s’en souvient. Et il lui a déjà choisi un surnom, d’ailleurs.
Tutoie-moi autant que tu veux Ren-chan. Pourquoi s’embêter ? ajoute-t-il avec un petit rire timide, la main devant la bouche.
C’est un réflexe qu’il a pris pour montrer sa manucure, et aussi parce qu’il adore faire ça. Il suffit de côtoyer Shizuma plus de trois minutes pour savoir qu’il n’y a rien de timide chez lui. Rien.
C’est pas tous les jours que je fais une séance avec une star. Qui t’a parlé de moi ? Comment es-tu arrivé.e là ? Tu as déjà fait du yoga ? Parle-moi de toi ! J’adore faire connaissance avant une séance. Ça détend tout le monde.
Star ou pas, Shizuma est très détendu. Hey, techniquement, il est lui aussi une star. Pas dans le milieu du yoga hélas. Il trouve qu’il n’a pas encore assez de followers sur Incinéragram, mais ça viendra.