Demain, nous voilà !

Assise dans la camionnette entre son frère et son employé, Ebiko fixe nerveusement la route, vérifiant toutes les trois secondes que sa couronne est bien en place. Elle est contente que le nécromancien ait proposé de les aider à déménager, surtout qu'elle comptait lui proposer de faire ça en plus moyennant payement. Mais comme il était volontaire, elle avait sauté sur l'occasion de faire des économies. Même s'il n'y avait pas de gros meubles - en dehors d'un kotatsu dont elle ne voulait pas se séparer - le camion était rempli de cartons. Beaucoup de potions, des kilos de vêtements et surtout des plantes en tous genres. Certaines iraient rejoindre la boutique, d'autres trouveraient leur place dans la nouvelle maison.

Au fond elle sait bien qu'Hoshiko n'est pas là pour ses beaux yeux, mais plutôt pour ceux d'Ushio. Ce dernier semblait ne rien remarquer du tout et elle adore les voir patauger. C'est devenu son petit feuilleton. Qui sait quand les choses bougeront un peu ? Personne et ça la fait bien rire. Elle a déjà filmé et pris des photos discrètement, pressée de les ressortir lorsque ces diverses tentatives ne seront plus qu'un lointain souvenir.

Arrivés à la boutique, ils sortent tous, Ebiko la dernière et elle ne peut s'empêcher d'admirer, émue, sa nouvelle propriété. C'est une jolie maison, qui a peut-être besoin d'un petit coup de neuf, mais rien d'impossible. A côté de son ancien logement, c'est une sacrée amélioration. Elle est ravie, surtout qu'elle passera à nouveau toutes ses soirées en compagnie de son jumeau.

   

Et ni une ni deux, elle attrape un stock de fioles pleines de potions aux effets divers et variés. Elle n'a pas du tout confiance en eux pour les transporter et un malheur est trop vite arrivé.

Bien encombrée avec son gros carton, Ebiko regrette un peu de ne pas avoir laissé les deux garçon l'aider, surtout lorsqu'elle doit déverrouiller la porte. Mais elle ne changera pas d'avis : hors de question qu'elle prenne autant de risques.

L'appartement sent un peu le renfermé, mais elle se sent chez elle. Ici, personne ne pourra critiquer ce qu'elle fait. Pour se débarrasser de l'odeur peu agréable, elle ouvre en grand toutes les fenêtres avant de redescendre. Elle a le temps de voir Ushio hausser les épaules, certainement en réponse à une question du nécromancien, mais laquelle ? Très bonne question. En tous cas, Hoshiko semble parfaitement indigné lorsqu'il passe à côté d'elle avec un carton, comme si son frère n'avait pas eu une réaction appropriée - c'est rarement le cas de toutes manières.

   

En le voyant se décomposer, la réponse paraît évidente : bien sûr que non. Il a attendu et repoussé jusqu'au dernier moment. Enfin, ils auront de quoi s'occuper.



Elle est un peu dubitative mais il ne lui laisse pas le temps de râler un peu plus et disparait à l'intérieur. Réduite au silence et un peu exaspérée par son détachement, elle attrape son énorme coffre à potions et après l'avoir calé contre sa hanche entreprend de monter les escaliers.

Étonnamment, Hoshiko la suit à l'étage au lieu d'aller aider son frère. Ebiko aurait pensé qu'il préférerait rester en compagnie du faux blond, mais peut-être pas tant que ça. Il a d'ailleurs réussi à prendre une caisse dont elle aurait aimé se charger elle-même, elle le voit à la petite pastille rose collée sur le côté, mais s'abstient de lui faire remarquer puisqu'elle est arrivée à destination sans accroc.

 

Avant de tout monter, il serait logique de faire un brin de ménage, ce qu'elle s'empresse de réaliser en allant chercher un balai dans l'arrière-boutique. Au moment où elle pose le pied sur la première marche, un grand bruit retentit, preuve de l'extrême maladresse d'Ushio. Dépitée, elle continue tout de même son chemin, prête au pire. Tant que ce n'était pas une étagère de plantes qui était tombée, tout irait bien.

Une fois en bas, elle ne put que constater qu'il avait renversé l'intégralité du carton de casseroles au sol. Rien de très grave.

 

   

Et ni une ni deux, elle l'abandonne armée de tous le matériel pour le ménage. Avant ce soir, elle aura transformé l'étage en un petit coin douillet. Leur petit coin douillet.

Le temps file pendant que la zombie nettoie le moindre centimètre carré de leur nouvel appartement. Bientôt, il y aura de la terre partout, mais pour le moment elle respire le neuf et la propreté. Elle note aussi le manque de concentration absolument évident de son employé qui semble autant perturbé par l'absence d'Ushio que par sa présence. Ils sont réellement incorrigibles, incapables de se bouger, l'un comme l'autre.

Peu avant midi, elle finit par prendre son frère à part et par signer dans un souci de discrétion.

 

 

Elle lève les yeux au ciel devant l'incompréhension du blond. C'est pourtant flagrant ? Hoshiko pourrait tenir une pancarte au-dessus de sa tête que ça ne serait pas plus évident que ça l'est déjà.

 

Certaine de l'avoir déjà vu se retourner sur le nécromancien, elle sait que ce n'est qu'une question de temps. Sauf qu'à ce rythme-là, ils y sont encore dans cinquante ans. Ce n'est pas un problème en soi vu qu'ils sont morts, mais tout de même !

Autant dire que quand Hoshiko propose un restaurant à son jumeau, elle en reste bouche bée. Enfin un peu d'action ! Un peu vexée d'être ainsi mise de côté, elle se raisonne en se disant que c'est une évolution positive et qu'elle ne doit surtout pas s'interposer, au contraire.

 

Sans plus de forme, elle les pousse dehors en leur mettant des manteaux dans les bras et après avoir vérifié qu'Ushio avait une écharpe et un bonnet pour faire face au froid de ce mois de février. Toutefois, malgré ce qu'elle peut dire, elle n'a pas l'intention de rester ici. Sa décision est prise et après une rapide recherche dans les cartons de déménagement, elle en sort une tenue plutôt sobre, une potion pour cheveux blonds et une paire de lunettes de soleil - un peu superficielle vu le nombre de nuages accumulés dans le ciel.

Maintenant blonde, sans couronne et munie d'une paire de lunettes de soleil en forme de cœur - la sobriété n'avait jamais été son truc - Ebiko suit à distance les deux garçons. Ils ont l'air de savoir où ils vont et elle espère juste qu'Ushio ne fera pas trop la tête. Pour qu'ils ne se sentent pas pressés par le temps, elle lui envoie un petit message : "Prenez votre temps, mais soyez revenus pour le goûter.". C'est bien joli les amourettes, mais son déménagement ne va pas se faire tout seul non plus.

Enfin pour le moment, elle trottine dans leur dos. Et alors qu'ils s'installent dans le restaurant choisi par son employé - il a plutôt bon goût il faut le dire - elle attend un peu avant de se glisser à son tour dans l'établissement. Bien évidemment, elle demande au serveur une table pas trop loin des deux énergumènes, prête à dégainer l'appareil photo au moindre geste mignon.